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Planifier l'avenir de notre système électrique :
Épisode I - Les enseignements des scénarios de transformation du système électrique
Ces travaux prennent la forme de deux épisodes qui se complètent, les propositions politiques de l’épisode II se lisent à la lumière des différents enjeux mis en évidence dans l’épisode I. Ces deux épisodes se concentrent sur le mix électrique et n’abordent pas directement l’ensemble de la bifurcation écologique et énergétique. Des fiches techniques publiées conjointement proposent un contenu pédagogique détaillé afin de comprendre le système électrique français et propose un état des lieux des connaissances scientifiques, techniques et sociales concernant les différents moyens de production d’électricité.
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Épisode I - Les enseignements des scénarios de transformation du système électrique. Cette note présente une comparaison inédite
des différents scénarios de transformation du système électrique français : RTE 2021, négaWatt 2021, ADEME 2018, négaTep 2017, etc.
Elle considère l’ensemble des enjeux liés à chaque moyen de production d’électricité : impacts sur le climat, sur la biodiversité,
consommation de ressources, pollutions, coûts, sûreté et sécurité, création d’emplois, précarité énergétique et paris technologiques.
- Épisode II - Planifier un système électrique au service d’impératifs sociaux, écologiques et démocratiques. Cette note propose une stratégie politique générale de planification sociale, écologique et démocratique de notre système électrique sur le long terme, afin de nous conduire à la neutralité carbone en 2050. Différentes hypothèses sont étudiées pour faire face aux enjeux décarbonation la plus rapide possible et d’une dénucléarisation planifiée. Cette note s’appuie notamment sur l’ensemble des connaissances scientifiques afin de répondre aux incertitudes inhérentes à la prévision des trajectoires de production électrique sur la base de principes écologiques et démocratiques.
Synthèse de l'épisode I
Aura-t-on assez d’électricité peu émettrice de carbone en France en 2050 pour atteindre la neutralité carbone ? De la réponse à cette question dépend la réussite ou non de la bifurcation écologique, qui implique une baisse drastique de nos émissions de gaz à effet de serre d’ici cette échéance, et donc la sortie des énergies fossiles. Y parvenir implique la réduction de notre consommation d’énergie et l’usage croissant d’une électricité qui reste peu émettrice de gaz à effet de serre pour une part grandissante de nos usages énergétiques. Cette révolution aura lieu dans un contexte particulièrement complexe en France, avec d’ici 2050 la fermeture inéluctable de la plupart de centrales nucléaires actuellement en exploitation, fournissant plus des deux tiers de la production d’électricité, ayant atteint leur durée de vie maximale.
Dans les 30 années qui viennent, il est donc indispensable de planifier la transformation de notre système électrique. Cela implique, d’une part, de s'appuyer sur la connaissance des enjeux techniques, sociaux et économiques propres au fonctionnement du système électrique et, d’autre part, de faire des choix politiques entre les différentes options techniquement envisageables qui s’offrent à la France.
Dans ce cadre, cette note adopte une approche émancipatrice et antilibérale, qui considère la bifurcation écologique et la justice sociale comme les grandes priorités de notre pays. Au vu des enjeux soulevés par l’avenir de notre système électrique - faire face au changement climatique, conserver un approvisionnement stable en électricité, bâtir une société plus juste - il est essentiel que les forces politiques analysent en détail les scénarios de transformation de notre système électrique et restituent dans le débat politique et médiatique ces enjeux, sans éviter les difficultés et les défis qui se posent au suivi de chacune des orientations qui s’ouvrent à la France.
Ce premier épisode propose une analyse comparative inédite des principaux scénarios de transformation électrique centrés sur la France, qui adoptent souvent des objectifs distincts et des hypothèses variées qu’il s’agit de comparer pour fonder une stratégie politique. Ces scénarios sont trop souvent distingués dans le débat public par la part respectivement accordée au nucléaire et aux énergies renouvelables, laissant trop souvent de côté les conditions de leur faisabilité, ainsi que l’impact de cette transformation en matière de justice sociale, de gouvernance et de respect des limites planétaires dans leur ensemble. Cet épisode met en évidence les enseignements utiles et les limites de chacun de ces scénarios, pour en tirer les propositions politiques concrètes qui sont détaillées dans l’épisode II.
- Une atténuation déterminée du réchauffement climatique implique ne pas s’arrêter aux annonces d’un objectif de neutralité carbone mais également de considérer les émissions cumulées de gaz à effet de serre d’ici 2050, ainsi que la prise en compte ou non du surcroît d’électricité que nécessite une réindustrialisation de la France, indispensable pour diminuer les émissions importées.
- Les politiques publiques de sobriété énergétique, en limitant la hausse de la consommation d’électricité et donc les besoins de production réduisent également les besoins industriels de mise en service de nouveaux moyens de production d’électricité, la consommation de matériaux associés - et donc la vulnérabilité aux ruptures d’approvisionnement, la production de déchets et de pollutions associées, et in fine les risques d’échec de la bifurcation écologique.
- La production électrique future sera essentiellement à base d’éolien, de photovoltaïque, d’hydroélectricité et potentiellement, selon le choix effectué, de nucléaire. Les seuls moyens de production d’électricité renouvelable technologiquement et industriellement matures, et soutenus par des filières industrielles capables de les déployer fortement et rapidement dans les décennies à venir sont les éoliennes terrestres, en mer, hydroélectrique et photovoltaïque.
- Développer le stockage et la flexibilité de la consommation sera indispensable, dans des proportions variables en fonction de la construction ou non de nouvelles centrales nucléaires. Cela implique le développement conjoint de batteries électriques, de barrages hydroélectriques réversibles, du stockage power-to-gaz-to-power, et d’une plus grande flexibilité en matière d’usage de l’électricité.
- Des incertitudes pèsent sur la quantité d’électricité qui sera nécessaire en 2050, mais son augmentation est certaine dans l’ensemble des scénarios récents, dans des proportions variables en fonction de l’importance de l’électrification des usages dans la décarbonation du système énergétique, et des politiques publiques de réindustrialisation et de sobriété énergétique anticipées.
- Un échec de la transformation de notre système électrique mènerait à l’impossibilité de l’atteinte de la neutralité carbone d’ici 2050 ou à des pénuries d’électricité : en cas de retard ou de développement de moyens de production insuffisants, le risque serait d’émettre une grande quantité de gaz à effet de serre supplémentaires avec le recours à des centrales à gaz fossile pour compenser le manque de production, ou de faire face à un manque d’électricité. En fonction du recours ou non à de nouvelles centrales nucléaires, chaque système électrique futur nous expose à des risques d’échecs variables en fonction des paris technologiques ou industriels.
- Quelque soit sa composition, le système électrique futur n’aura que peu d’impact sur la biodiversité : si un système 100% renouvelable serait responsable d’une proportion légèrement plus importante d’artificialisation des sols qu’un système basé sur une part de nucléaire, cela resterait dans des proportions négligeables vis-à-vis des autres activités humaines (2 à 6 % de l’objectif global d'artificialisation fixé pour les prochaines années).
- Le coût prévisionnel ne doit pas être le premier facteur de choix d’un système électrique. Une évaluation fiable des différentes possibilité qui s’offrent à la France nécessite une évaluation des coûts complets du futur système électrique, intégrant le coûts des moyens de production d’électricité, mais aussi ceux de la flexibilité et du stockage d’électricité, le raccordement des nouveaux moyens de production, le démantèlement des centrales, le stockage des déchets radioactifs, etc. Les écarts de coûts sont limités d’un scénario à l’autre. Le facteur ayant le plus d’influence sur ce coût futur est celui de la rémunération du capital à l’origine des investissements dans les futurs moyens de production d’électricité : une implication et un financement directs de l'État avec un faible taux de rémunération du capital aurait donc pour conséquence une diminution importante du coût de la transformation du système électrique.
- Enjeux de sûreté et de sécurité ;
- Enjeux de sécurité d'alimentation ;
- Enjeux de gouvernance et de propriété ;
- Enjeux industriels et technologiques ;
- Spécificités propres aux outre-mers.
Fiches thématiques
La rédaction de cette note a été précédée par un travail de synthèse des connaissances scientifiques sur les différents moyens de production d’électricité, rassemblées dans dix fiches techniques publiées courant 2022. Les cinq premières sont accessibles ci-dessous.
A venir :